
Mistral AI rivalise-t-il avec ChatGPT ?
Ils sont trois fondateurs, passés par DeepMind et Meta. Ils n’ont ni campus californien, ni armée de communicants. Moins d’un an après la création de Mistral AI, leurs modèles de langage rivalisent avec ceux d’OpenAI. À coups d’open source radical, de performances redoutables, et d’un storytelling qui sent l’excellence Polytechnicienne. Alors derrière les milliards levés et les discours sur “l’IA entre toutes les mains”, une question persiste : Mistral AI peut-il vraiment rivaliser avec ChatGPT ? Ou n’est-ce qu’une belle illusion européenne ? The New Siècle s’est intéressé à cette ascension aussi rapide que risquée.
Le décor est posé. ͏D’un côté,͏ ChatsGP͏T: ͏prod͏u͏it important ͏d’OpenAI, gonflé av͏ec des milliards de Microsoft (10 pour êtr͏e précis), prêt avec une ͏installation global͏e et un modè͏le devenu signe ͏d’int͏elligen͏ce artificielle, comm͏e p͏our Google ͏qui est devenu synonyme de recherche en͏ ligne. ͏De l’autre côté, Mistral AI,, une jeune͏ entreprise fondée à Paris en avril 2023, n’était pas très connue il y a un an; mais maintenant elle͏ est passée au rang de licorne en un͏ court temps.
La comp͏a͏r͏aiso͏n n’a donc rien de fou. Trois grands tours de table dans une année, avec un total de 1 ͏milliard levé et une centaine ͏de savants tirés ͏chez les meilleurs. Une attaque technique r͏apide, démarrée de͏pu͏is Paris. Les aides ? Des gros noms comme Xavier Niel, Eric Sch͏midt (ancien Google), Microsof͏t (par ͏Azure), et quelques fon͏ds américains. En bref, Mistral est européen par͏ ses origine͏s, mais son ré͏seau est global.
ChatGPT vs Mistral AI , deux modèles affûtés comme des scalpels
Le premier modèle de Mistral AI, Mistral 7B, a été pensé comme un contre-exemple vivant. Deux fois moins de paramètres, et pourtant davantage d’intelligence. Il utilise des techniques d’optimisation qui réduisent le coût de calcul tout en augmentant la pertinence des réponses. En clair : il va vite, il comprend bien et il ne sature pas les machines.
Puis vient Mixtral 8×7B. Un modèle “sparse”, dit-on. Ce qui signifie qu’il n’utilise que deux experts sur huit à chaque fois qu’il traite une phrase. Le gain ? Des performances dignes d’un modèle géant, mais avec l’agilité d’un modèle léger. Plus rapide, plus économe, plus malin. Selon leurs propres tests, il dépasse LLaMA 2 70B, le rival open source signé Meta. Et sur certains benchmarks, il joue désormais dans la même cour que GPT-3.5. Le tout, rappelons-le, sans que personne n’ait à sortir sa carte bleue.
Le duel de l'Open source contre les modèles fermés
Mistral AI ne vend pas du rêve, il vend du code. Ou plutôt, il le donne. L’open source est leur promesse numéro une. Presque tous leurs modèles, Mistral 7B, Mixtral 8×7B, et même le gigantesque Mixtral 8×22B, sont sous licence Apache 2.0, c’est-à-dire en libre accès. Pour une startup, c’est un suicide économique… ou un coup de maître.
Ici, c’est la deuxième option qui s’impose. Et elle fait du bruit. Cette stratégie a deux effets immédiats : d’abord, la communauté suit, les développeurs du monde entier adoptent, testent, et améliorent. Ensuite, les entreprises s’y intéressent. Car contrairement à ChatGPT, on peut installer un Mistral sur ses propres serveurs. Personne ne lit vos données, ni ne vous facture chaque requête. Pour les secteurs sensibles, comme la santé, la défense, ou encore la justice, il s’agit-là d’un argument de taille. Une audace qui frappe là où ChatGPT reste fermé, inaccessible, protégé derrière une API (interface de programmation d’application) payante.
Mistral AI lorgne l’économie fermée de ChatGPT
Si l’open source a fait connaître Mistral AI, ce n’est pas sur GitHub que se gagne la bataille contre ChatGPT. Elle se joue ailleurs, sur un le terrain des modèles fermés, haut de gamme, hébergés à distance, calibrés pour les grands comptes. Exactement là où OpenAI déploie GPT-4 via son API.
En 2024, la startup française dévoile Mistral Large, un mastodonte de plus de 100 milliards de paramètres. Puis Pixtral, son premier modèle multimodal capable de comprendre le texte et les images. Ces modèles ne sont plus libres. Ils sont inaccessibles au téléchargement, et réservés à une exploitation via API commerciale, dans un format qui rappelle de très près celui d’OpenAI.
Un virage qui rappelle que l’open source attire, mais que ce sont bien les API qui rapportent. Avec cette nouvelle voie l’entreprise change d’échelle et de cible. Elle ne s’adresse plus aux hackers du dimanche, mais aux entreprises exigeantes, prêtes à payer cher pour une IA robuste et performante. Autrement dit : Mistral AI commence à jouer le jeu de ChatGPT, sur le terrain d’Open AI. Et s’il y a imitation, elle est stratégique : il ne s’agit plus seulement d’exister. Il s’agit de peser.
Une interface ? Oui, mais secondaire chez Mistral AI
L’interface de Mistral AI, sobrement baptisée Le Chat, n’a pas encore la fluidité ni la finesse d’interaction d’un ChatGPT. Elle est élégante, efficace, mais demeure austère, presque technique. Et c’est voulu, ce n’est pas un produit grand public mais un outil pensé pour celles et ceux qui veulent garder la main sur leur intelligence artificielle : ingénieurs, architectes logiciels, responsables IT. Là où OpenAI séduit l’utilisateur lambda avec une interface léchée et des réponses calibrées, Mistral vise d’abord les bâtisseurs.
Une version Pro est déjà en ligne, avec des fonctions avancées comme la navigation web en temps réel ou la génération d’images, réservées jusqu’ici aux plateformes les plus matures.
Le Chat s’étoffe, module après module. L’expérience devient plus souple et plus riche, sans perdre l’esprit d’ingénierie qui fait sa singularité. L’ambition est explicite : dépasser le simple modèle de langage. Proposer un environnement de travail complet, pilotable, maîtrisable, mais également extensible. Pas une interface d’assistance, mais une plateforme d’autonomie.
Mistral AI, les failles d’un modèle ouvert ?
L’open source a un prix… Pas pour l’utilisateur, mais pour Mistral AI lui-même. Offrir gratuitement des modèles haut de gamme, c’est noble. Mais comment générer des revenus durables quand tout est libre ? Le pari repose sur la vente de services premium (API, cloud, fine-tuning…). Encore faut-il que le marché suive. Autre point faible : l’alignement. Là où OpenAI a investi des millions dans la modération, Mistral livre ses modèles bruts. Sans filtre. C’est à l’utilisateur de faire le reste. Un parti pris risqué, car une mauvaise utilisation ou un bad buzz, pourrait bien tout faire vaciller.
Enfin, l’écart avec GPT-4 reste réel. Les modèles de Mistral brillent face à GPT-3.5, mais sont encore loin de la dernière génération. Pour franchir ce cap, le talent ne suffira pas. Il faudra du temps, des données, et des infrastructures encore plus puissantes. Des moyens que seuls les géants ont, pour l’instant…

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