
Interview : Benjamin Zerah – Fondateur et CEO de Feeli
Benjamin Zerah a fondé Feeli en 2019 après un parcours entrepreneurial débuté à l’EDHEC et nourri par des échanges avec des médecins partenaires. Le concept est de proposer une téléconsultation intelligente ayant pour base un questionnaire et une messagerie instantanée.
L’idée est de me permettre à chacun d’obtenir un diagnostic en moins de deux heures 7/7 24/24 pour des spécialités comme la dermatologie, la médecine générale et la santé mentale. Pensée comme une réponse concrète aux déserts médicaux, la plateforme mise sur la téléconsultation sans rendez-vous et un système de tri médical automatisé qui guide le médecin, plutôt que sur la visioconférence classique. En quelques années, le service a séduit un large public. Fin 2024, Feeli a franchit le cap du million de patients
Dans cette interview exclusive, The New Siècle explore avec Benjamin Zerah les origines de Feeli, son positionnement sur le marché de la télémédecine, son modèle économique et réglementaire, ainsi que ses ambitions d’innovation et d’expansion.
I. Miser sur un modèle différent
La plateforme Feeli se positionne comme un service rapide, sans rendez-vous, centré sur la messagerie et le suivi personnalisé.
1 – Dans un paysage concurrentiel où Doctolib, Qare, Kry/Livi, Teladoc et d’autres proposent aussi des services de téléconsultation, qu’est-ce qui différencie Feeli de ces autres acteurs ?
« Feeli est différent de ces concurrents du fait que nous proposons un service sans rendez-vous et une variété de pathologies. De plus nous utilisons trois étapes clés:
- Le questionnaire pré diagnostic, permettant un premier filtre et une connaissance large de la pathologie du patient ;
- Un échange avec le médecin permettant d’affiner l’analyse et de communiquer un traitement sous ordonnance ;
- Un suivi post consultation, inédit, permettant au médecin de suivre l’évolution du traitement communiqué. » – Benjamin Zerah
Après sa création, Feeli enregistrait déjà plus de 200 téléconsultations par jour avec une croissance mensuelle de l’ordre de 25%.
2 – Comment avez-vous structuré votre organisation pour soutenir une telle montée en puissance ?
« Il y a eu plusieurs phases à la création de Feeli : nous avons réalisé une dizaine de consultations par jour, puis très vite la demande a fortement augmenté pour se situer autour du millier de consultations par jour dans les périodes hautes. Nous sommes d’ailleurs les seuls à proposer un diagnostic avec un dermatologue en seulement quelques heures. Fort de cette promesse unique, nous avons réalisé plus de 100% de croissance en quelques mois sur cette thématique. » – Benjamin Zerah
II. Naviguer dans un cadre exigeant
Feeli facture actuellement la téléconsultation 30 €, montant réglé directement par le patient. Cette prestation est « hors nomenclature », ce qui signifie qu’elle n’est pas remboursée par l’Assurance Maladie.
3 – Quel est votre modèle économique et comment gérez-vous la question du remboursement par la Sécurité sociale et les mutuelles ?
« Nous nous sommes rendus compte, que l’écart entre le remboursement perçu et ce que vous payez réellement est de plus en plus important. Nous avons fait le choix de proposer un service de qualité et une promesse assez forte concernant la prise en charge quasiment instantanée. A l’instar de certaines spécialités hors nomenclature, les consultations de Feeli peuvent être prises en charge par les mutuelles. » – Benjamin Zerah
En mars 2023, Feeli a été visée par une injonction de la DGCCRF pour « pratiques commerciales trompeuses », notamment en lien avec sa communication sur l’éligibilité au remboursement et la disponibilité des services. Ce recours a finalement été levé après un appel gracieux de la société.
4 – Quelles leçons en avez-vous tirées pour garantir la transparence des informations fournies aux patients ?
« Les faits remontent à 2021, nous étions dans une période assez folle en sortie de Covid-19, avec une croissance annuelle de plus 500 % et des conditions réglementaires évolutives. Effectivement, cette injonction nous a appris à mieux cadrer notre modèle, cette expérience envers l’administration nous a renforcé pour proposer une offre claire sur nos promesses. Nous avons la chance d’avoir un pays qui se préoccupe du bien de ses citoyens, il est important que le privé et le public soient complémentaires. » – Benjamin Zerah
Dans le milieu de la santé, la protection des données est un enjeu majeur.
5 – Quelles mesures avez-vous mises en place pour garantir la confidentialité et la conformité ?
« Nous sommes hébergés au sein d’AWS France (Amazon Web Services), il est l’un des seuls à avoir obtenu une certification HDS, ce qui signifie des sécurisations renforcées et un label renouvelé tous les 3 ans par une agence indépendante. De plus, en interne, nous n’avons pas accès aux données médicales du patient. Il est tenu de préciser que les échanges entre le patient et le médecin sont soumis au secret professionnel. » – Benjamin Zerah
III. Imaginer la santé de demain
Feeli développe des modules d’intelligence artificielle pour enrichir son service, notamment dans l’analyse des données cliniques et l’aide au diagnostic.
6 – Quels autres rôles l’IA est-elle amenée à jouer, au-delà du diagnostic, dans le parcours de soin que vous proposez ?
« La santé est le domaine où l’IA sera la plus pertinente, et au cours de sa vie, chaque individu possède des milliers de données sur sa santé. Avec les capacités de calculs actuels, l’analyse de ces données par le médecin prendra quelques secondes contre des dizaines de minutes. Nous voyons l’IA comme un assistant médical qui permettra au médecin de proposer un diagnostic complet avec le minimum de risque. Actuellement nous sommes en phase d’expérimentation avec certains de nos médecins… » – Benjamin Zerah
L’ambition affichée de Feeli est aussi de s’exporter à l’international, notamment en Europe et en Amérique du Nord.
7 – Quelles seront les étapes clés de ce développement à l’étranger ?
« Nous avons commencé à faire des pilotes en Belgique et en Suisse en attaquant plusieurs spécialités comme la santé mentale et physique. Le rythme de croissance est progressif et nous pensons attaquer d’autres pays comme l’Allemagne qui est un fort consommateur de santé en ligne. Pour y arriver, nous pouvons compter sur des partenaires médicaux qui sont déjà implantés dans ces pays. » – Benjamin Zerah
The New Siècle remercie Benjamin Zerah d’avoir répondu à notre interview et ainsi partager sa vision et son expérience à nos lecteurs.

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