
La start-up Huspy va-t-elle réussir là où les géants de la proptech ont échoué ?
La proptech a longtemps promis une révolution. Des géants ont levé des fortunes pour réinventer l’achat immobilier… avant de s’écrouler sous des modèles intenables et un marché devenu imprévisible. C’est dans ce décor que surgit Huspy, jeune pousse Dubaïote qui s’impose depuis 2020 comme un contre-exemple, forte d’une levée de fonds série B à 59 M$ en juillet 2025, menée par Balderton Capital. The New Siècle a décrypté le pari lancé par cette start up agile, adossée à une technologie légère.
Quand les géants de la proptech se sont effondrés
Ils devaient transformer le marché immobilier mondial. Zillow aux États-Unis, Opendoor dans la foulée, Compass à Wall Street… Tous affichaient la même promesse, faire du secteur le prochain terrain de jeu de la Silicon Valley. Leurs levées de fonds se comptaient en milliards et leurs introductions en Bourse attiraient les plus grands fonds, avec en toile de fond une communication respirant l’arrogance des licornes triomphantes.
Puis la réalité les a rattrapés. Le modèle iBuyer (ou iBuying), où les plateformes achètent des biens pour les revendre à coup d’algorithmes, s’est révélé un gouffre. En 2021, Zillow a dû abandonner cette activité après avoir perdu plus de 500 millions de dollars en quelques mois et liquidé près de 7 000 maisons. Opendoor, longtemps présenté comme la success story du secteur, a vu sa valorisation boursière fondre de plus de 80 % depuis son pic de 2021, affichant encore près d’un milliard de pertes en 2023. Quant à Compass, introduit en Bourse en 2021, il se débat toujours avec des résultats déficitaires et un cours divisé par deux. Le problème étant que ces sociétés ont brûlé du cash pour conquérir à toute vitesse des marchés immenses… sans tenir compte des cycles immobiliers ni des contextes locaux.
Huspy, l’outsider de Dubaï qui bouscule les codes
Un modèle léger, une technologie taillée sur mesure
À rebours des mastodontes (principalement américains), la proptech Huspy s’est construite sans bruit à partir de 2020. Ses cofondateurs, Jad Antoun et Khalid Ashmawy, ont toujours eu en ligne de mire la volonté de faire du parcours immobilier un processus fluide, du premier clic jusqu’à l’obtention du prêt. Là où Zillow ou Opendoor par exemple se sont alourdis en rachetant des biens pour les revendre, la start-up de Dubaï reste asset-light, c’est à dire qu’elle ne possède rien, mais met à disposition des outils qui permettent aux autres de mieux travailler. Simple et efficace.
Autre force, la technologie dite propriétaire. Le CRM (Customer Relationship Management ou gestion de la relation client) permet aux agents de suivre chaque prospect, d’automatiser leurs relances tout en centralisant les échanges. Les modules transactionnels, eux, fluidifient les étapes juridiques et administratives (sources de retards et de paperasse sans fin), qui accompagnent une vente. Quant au parcours en ligne, il intègre directement les banques partenaires : un acheteur peut obtenir une pré-approbation de crédit en quelques clics, via une sorte de chatbot hypothécaire qui confirme son éligibilité et son montant avant même de signer quoi que ce soit.
Il y a aussi le poids des partenariats bancaires. En obtenant des accords directs avec les établissements financiers, Huspy simplifie la vie des acheteurs comme des agents. Là où la concurrence reste souvent cantonnée à l’apport de leads, la jeune pousse verrouille une étape cruciale qui est l’accès au financement et se positionne ainsi sur le courtage hypothécaire nouvelle génération, mêlant digitalisation et relation bancaire directe.
La patience comme stratégie de conquête
Chez Huspy, on prend le temps, quitte à laisser les effets d’annonce aux autres. Pas de conquête mondiale à coups de milliards, mais une stratégie « ville par ville », chaque marché validant le précédent. Les ouvertures sont calibrées et testées, puis consolidées avant de passer à l’étape suivante. Cette patience (rare dans la tech), tranche avec l’hubris des géants déchus… et pourrait bien faire la différence.
À Dubaï en tout cas, et plus largement au Moyen-Orient, ce choix a porté ses fruits. La start-up revendique déjà plus de 7 milliards de dollars de transactions par an et contrôle près d’un tiers du marché hypothécaire résidentiel. Autrement dit, elle gère plus de prêts immobiliers que n’importe quel autre acteur indépendant de la région. Une performance d’autant plus remarquable qu’elle a été obtenue en moins de cinq ans, dans un marché ultra-concurrentiel où banques et courtiers dominaient jusque-là sans partage. De quoi installer la proptech Huspy comme un acteur difficile à ignorer, là où d’autres n’ont laissé que des désillusions.
L’Espagne comme laboratoire, Riyad comme prochain test
Après avoir verrouillé son marché d’origine, Huspy a choisi l’Espagne pour écrire son deuxième chapitre. Madrid, Valence, Malaga, Alicante… autant de terrains où la jeune pousse a voulu mesurer la solidité de son modèle hors du Golfe. Les premiers chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, le volume de transactions a été multiplié par vingt. Une expansion rapide en Espagne, qualifiée par beaucoup d’hypercroissance du marché, qui a convaincu la direction d’ouvrir six nouvelles villes d’ici fin 2025.
Pourquoi l’Espagne ? Le pays dispose d’un marché immobilier dense et fragmenté, fortement alimenté par l’investissement étranger. Un terrain idéal pour tester une plateforme d’achat immobilier digital qui simplifie et centralise ce qui reste, ailleurs, souvent chaotique. C’est dans cette logique que Huspy a tissé des partenariats stratégiques avec des acteurs locaux comme Idealista, gisement d’annonces et de leads pour nourrir sa croissance.
La vraie épreuve se profile de l’autre côté du Golfe. L’Arabie saoudite, en pleine mutation avec le programme Vision 2030, ouvre une fenêtre unique pour les acteurs capables d’accompagner la modernisation du marché immobilier. Riyad sera le prochain test grandeur nature. Si la proptech Huspy parvient à s’y implanter, elle pourra démontrer que son modèle n’est pas seulement exportable en Europe… mais capable de s’adapter à des environnements culturels et réglementaires bien différents.
Huspy propose une autre façon d’imaginer la proptech, moins flamboyante et plus pragmatique. Là où Zillow ou Opendoor se sont brûlés les ailes à coups de milliards, la start-up de Dubaï avance par ajustements, ancrée dans la réalité des marchés. Soutenue par Balderton Capital, Peak XV Partners et d’autres investisseurs, elle mise sur une croissance patiente, entre digitalisation et ancrage local. Reste à savoir si cette méthode suffira à transformer une réussite régionale en modèle mondial, ou si Huspy finira par rejoindre la longue liste des promesses envolées de l’immobilier digital…

Les + vues
Inscrivez-vous !
INSCRIVEZ-VOUS À
NOTRE NEWSLETTER !
Renseignez votre adresse mail
pour recevoir nos nouveautés
et rester informé de nos actualités.
Top Mots Clés :
Laisser un commentaire