
Interview : Alexandre Louyot – Président de Native
Alexandre Louyot connaît les deux versants du métier de courtier en assurance : celui des grandes structures, et celui des cabinets indépendants. Après un début de carrière dans le conseil et la gestion de patrimoine, il prend la tête de Native Assurance en 2023 en tant que Président, un cabinet de courtage indépendant basé à Paris, dédié aux dirigeants de PME, professions libérales et travailleurs non salariés. Ici, pas de plateforme automatisée ni de produit maison. Ce modèle, à mi-chemin entre le conseil stratégique et l’assurance sur-mesure, s’appuie sur différentes structures dont son cabinet Louyot & Partners
Dans cet entretien exclusif, The New Siècle a interrogé Alexandre Louyot sur la concentration actuelle du marché, la redéfinition du métier de courtier, les angles morts du secteur de l’assurance et l’avenir de la profession entre normalisation et digitalisation.
I. Les assurances à découvert ?
Vous travaillez avec de très grands assureurs comme Generali, AXA ou Swiss Life. Mais ces groupes ont leurs propres intérêts commerciaux.
1 – Comment garantissez-vous que vos conseils restent réellement indépendants ?
« Nous sommes courtiers en assurances et la force de notre métier est justement d’avoir accès à un panel d’offres nous permettant de répondre à tous les besoins de nos clients ! La transparence des offres avec nos clients est importante. Le but est de proposer plusieurs solutions à notre clientèle et de sélectionner la meilleure. Nous représentons les intérêts de nos clients en tant que courtier, c’est eux qui nous mandatent, et non pas la compagnie d’assurance. » – Alexandre Louyot
Depuis 2022, les règles pour les courtiers se sont renforcées : immatriculation ORIAS, formation continue obligatoire, transparence des rémunérations, nouvelles obligations concernant le démarchage téléphonique… Beaucoup d’acteurs ont quitté le marché.
2 – En quoi ces nouvelles réglementations ont-elles redéfini, selon vous, ce qu’est un “bon courtier” ?
« La conformité prend en effet de plus en plus de place dans notre métier, que l’on soit courtier ou gestionnaire de patrimoine. C’est un investissement en temps important que ce soit pour la mise en place des process liés à l’évolution de ces réformes et aussi pour les mettre jour. Mais je pense qu’il faut aussi prendre celles-ci comme des opportunités permettant aux courtiers d’exercer encore mieux leur activité, en connaissant mieux le client, en recueillant l’ensemble des éléments nécessaires à l’élaboration du projet/contrat et à la conformité de son cabinet. » – Alexandre Louyot
Des startups 100 % en ligne comme Luko, pourtant très visibles, ont fini en procédure de sauvegarde et ont été revendues à perte, faute de rentabilité. Luko a d’ailleurs été racheté par Allianz.
3 – Est-ce que cet échec n’est pas révélateur des failles dans le modèle des assurtechs 100 % digitales ?
« Je pense qu’il y a beaucoup de startups et structures qui se sont lancées dans l’assurance et la finance. C’est bon signe, cela prouve qu’il y a une vraie demande ! Le digital doit amener une vraie valeur ajoutée dans la relation avec nos clients, accélérer les process, faciliter les interactions avec les clients et leur espace client par exemple, mieux recueillir la data pour affiner nos solutions. » – Alexandre Louyot
II. Zones grises de l’assurance…
Les tarifs de certaines assurances ont explosé en 2024, notamment en santé ou en prévoyance. Cela pèse directement sur les petites entreprises.
4 – Avez-vous une solution aujourd’hui qui réponde à ces contraintes budgétaires ?
« Les mutuelles subissent souvent une indexation annuelle qui est plus importante, il est vrai, selon une période précise et selon la consommation des assurés. Je comprends que certains clients trouvent celle-ci élevée mais les assureurs doivent respecter certaines indexations pour maintenir de bons niveaux de garanties et de services. Certains assureurs essaient bien sûr de faire baisser ces indexations en les limitant ou en donnant parfois un budget à leurs courtiers pour diminuer celles-ci aux clients qu’ils auront choisis et qui peuvent en bénéficier. » – Alexandre Louyot
Moins de 1 % des PME-TPE françaises sont aujourd’hui couvertes contre les cyber-risques, pourtant en forte hausse.
5 – Pourquoi ce type de risque reste-t-il si peu assuré ?
« Ce risque est pourtant très connu, mais je pense que peu de jeunes entreprises sont vraiment sensibilisées avant ou en lancement sur les cyber risques et l’impact que cela peut avoir sur la pérennité de leur structure.
De plus, je pense que le coût de ce type contrat est assez opaque pour beaucoup d’entrepreneurs, et peut freiner l’intérêt de ce produit pourtant vraiment très important pour beaucoup de structures, pure player ou non. » – Alexandre Louyot
III. Un métier à réinventer ?
Avec la plateforme Zelros, l’intelligence artificielle peut déjà proposer une assurance adaptée au profil d’un client, parfois sans qu’un courtier n’intervienne.
6 – Peut-on imaginer qu’à terme, l’IA remplace le métier de courtier ?
« Non, les courtiers auront toujours un rôle de conseil et accompagnement, surtout sur le marché du chef d’entreprise. Un dirigeant a besoin de conseils précis et d’un accompagnement avec un interlocuteur à qui s’adresser quand son entreprise évolue avec de nouveaux besoins, ou quand elle a un sinistre par exemple. Un chef d’entreprise a beaucoup de besoins assurantiels et avoir un bon courtier lui permet d’y répondre.
L’IA va permettre de répondre encore plus précisément aux besoins du client et d’améliorer la qualité du service client tout en accélérant le traitement des tâches chronophages qui seront automatisées. » – Alexandre Louyot
7 – Quels sont les plus grands défis pour les courtiers dans les 3 à 5 prochaines années ?
« La conformité restera centrale, avec des exigences réglementaires toujours plus strictes. Mais le vrai enjeu, c’est d’intégrer intelligemment le digital et l’IA sans perdre ce qui fait la valeur d’un courtier : le lien humain et le conseil sur-mesure. Il faudra toujours savoir garder une proximité avec ses clients malgré le développement du digital. » – Alexandre Louyot
The New Siècle remercie Alexandre Louyot d’avoir répondu à notre interview et ainsi partager sa vision du marché et son expertise à nos lecteurs.

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